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16 novembre 2007

Sondagite en Sarkoland

La sondagite aigüe a envahi la France depuis des années, mais surtout depuis qu'on est entrés en Sarkoland. Etrangement, peu de sondages sur la popularité du Président sortent en ces temps d'agitation sociale. Par contre, les autres sondages pullulent dans les médias. Pourquoi?

Nous sommes envahis. Sondages sur les réformes, sondages sur les "fuites" comme l'augmentation de Sarkoléon, qui sonnent comme dessondages plébiscites napoléoniens. Ces sondages, s'ils s'avèrent favorables, sont publiés et répercutés à l'envi dans les médias: l'opinion publique légitime alors les "réformes", aux yeux de... l'opinion publique. C'est un peu le serpent qui se mord la queue, mais le système a l'air de fonctionner.
Outre le fait que nous avons là un des traits bien connus du populisme, puisqu'on peut assimiler ces incessantes sollicitations de l'opinion à une sorte d' "appel au peuple", il est inquiétant de voir l'utilisation qui est faite de ces sondages.
Sarkozy dit "j'ai été élu par la majorité, laissez moi agir". Les sondages étant comme des minis plébiscites, ca veut aussi dire "laissez-moi agir" puisque l'opinion publique est derrière moi.

La sondagite

Les sondages, véritablement érigés en instrument de gouvernement par notre as de la com'  et sondageovore de l'Elysée,  continuent de nous sonder sur à peu près tout.
Où l'on apprend pêle mêle selon un sondage de l'institut BVA pour l'Express publié le 14,  que Sarkozy aurait toujours 55% d'opinions favorables pour 38% d'opinions négatives. Ce sondage a été fait auprès d'un peu moins de 1 000 personnes, face à face ce qui biaise encore les réponses. Il est publié dans un article intitulé "Nicolas Sarkozy plaît quand il monte au front". Dans un journal de droite, ce n'est pas étonnant de lire ce genre commentaires, mais là on peut estimer que ce sondage sert à appuyer les positions pour le moins rigides de Sarko, qui a dit lui-même qu'il comptait sur l'opinion publique pour remporter le bras de fer contre les cheminots et autres agités. Et les médias de reprendre en choeur le sondage IFOP (l'institut de Laurence Parisot la chef du Medef) affirmant que "62% des français sont favorables à la réforme".
On attend toujours les sondages sur les régimes spéciaux des députés et sénateurs, qui se sont discrètement augmentés cet été, ou sur les revendications des français en matière d'économie.
Où est passé le sondage disant que 63% des français voulaient un référendum sur le "mini" traité? (Sondage Louis Harris pour Financial Times repris par Marianne) Sondage qui n'a pas été fait par un institut français mais étranger, comme si cette question n'avait aucun intérêt.

Le 12 novembre, l'AFP reprend un sondage LH2 (par téléphone auprès d'environ 1 000 personnes) pour Libération: " Sarkozy en baisse de 7 points à 54%, Fillon perd 4 points à 47%", et précise que Sarko Fillon ont perdu 12 points en 2 mois, et que les opinions défavorables ont augmenté de 5%.

Le lendemain, toujours par l'AFP, c'est  "Régimes spéciaux: la grève de mercredi "pas justifiée" pour 55% des Français", une dépêche écrite d'après les chiffres du sondage BVA pour BFM et Les Echos ("la radio de l'économie" et télé du CAC 40). La même AFP, le même jour, lance une autre dépêche indiquant qu "une majorité de français juge mauvaise la politique économique", reprenant le même sondage, à l'instar de nombreux médias comme La Tribune (qui deux jours plus tôt titrait "6 français sur 10 jugent "injustifiée" la grève pour les régimes spéciaux, selon un sondage", le fameux sondage IFOP pour le gratuit Métro) ou 20 minutes. Bel imbroglio.

Le Nouvel Obs, le 13, publie un article intitulé "Sondage: Nicolas Sarkozy perd cinq points, François Fillon, six" citant 58% d'opinions favorables. Le lendemain, un nouvel article, intitulé cette fois "Sondage: popularité stable pour Nicolas Sarkozy, en baisse pour François Fillon". En fait il s'agit même d'une "enquête mensuelle". Tiens donc, les dirigeants de ce pays seraient à ce point déconnectés de la population, qu'en plus des RG il faudrait aussi des sondages d'opinion chaque mois?
L'article explique également que "
58% des Français estiment que le gouvernement ne doit pas céder face aux mouvements de grève contre le projet de réforme des régimes spéciaux de retraite, contre 34% qui sont d'avis contraire." Challenges reprend le même sondage le même jour et titre : "Régimes spéciaux : 6 Français sur 10 pour que le gouvernement ne cède pas". Voilà qui sent la légitimation populaire d'une réforme antisociale.
A lire le sous titre, sur la cote de Sarko, on se croirait en train d'écouter les commentateurs d'un match de foot : "La cote de popularité de Nicolas Sarkozy reste inchangée en novembre à 55% et celle de François Fillon perd 1 point à 42%"

Les réformes sont aussi l'objet de nombreux sondages. Il est par ailleurs intéressant de relier les chiffres mentionnés avec le ou les commanditaire(s).

Le lendemain, le 14 novembre (jour de la grève des cheminots), Le Nouvel Obs revient à la charge, titrant : "Pour 84% des Français, le gouvernement ne cédera pas". On apprend également que, selon un sondage Opinionway pour Le Figaro et LCI, "69% des français estiment que le grève contre la réforme des régimes spéciaux n'est pas justifiée". Alors de deux choses l'une: ou bien les français ont la science infuse et connaissent non seulement le contenu de la réforme, mais aussi la situation actuelle du régime des cheminots, ce qui semble peu probable, soit ils donnent leur avis sur un sujet qu'ils ne connaissent pas. Ou alors, peut-on penser que "les français" se croient aptes à donner leur avis car ils pensent connaître le problème puisqu'ils suivent religieusement le JT chaque soir?

Quel impact sont censées avoir ces "informations"?

Souvent les résultats varient considérablement d'un institut à l'autre, comme l'a récemment souligné Le Nouvel Obs dans un article intitulé "54% des Français pour la grève selon CSA, 55% la considère injustifiée selon BVA". L'un des sondages a été publié dans Le Figaro, l'autre dans l'Humanité, le 17 octobre. Devinez qui avait commandé quel sondage.
Entre la cote de popularité de Sarko et celle de ses mesures, les sondeurs ont de quoi travailler, même hors période électorale.

sarkozysondagesco7La sondagite: méthode de canalisation de l'opinion

On trouve donc tout et son contraire dans les multiples sondages, parfois le même jour et dans le même média. Il n'y a donc pas vraiment de souci de cohérence, puisque par exemple l'AFP relate les sondages tels quels, sans analyse ni critique des réultats, même si certains se contredisent. L'AFP est la principale agence de presse française et fournit une bonne partie de leurs infos aux médias, qui reprennent souvent presque telles quelles les dépêches.

Mais à quoi servent les sondages, puisqu'il est à peu près admis qu'ils ne sont pas fiables.
D'abord, les sondages permettent d'influencer l'opinion publique, et c'est là leur but principal.

Qu'est-ce que l'opinion publique? Il semble qu'elle soit considérée comme étant l'opinion majoritaire de la population, les points de vue dissidents n'étant jamais pris en compte. C'est tout récent, le concept a été défini lors de la deuxième guerre mondiale, quand on s'est soucié de propagande et de guerre psychologique, c'est-à-dire d'influencer l'opinion publique allemande comme celle des pays alliés. A partir de ce moment là, on s'est penché sur les moyens d'influencer, voire de manipuler cette opinion. Un dénommé Gallup a alors mis en place un certain nombre d'instruments pour voir comment l'info est perçue par ladite opinion publique, et comment elle réagit à cette information. Les sondages électoraux commencent, relayés sans faillir par l'ensemble des médias. En gros, Gallup invente les sondages. Très vite, les sondages deviennent l'opinion.

Comment les sondages influencent ils l'opinion publique? Esssentiellement en mettant certaines problématiques à l'ordre du jour, en posant aux gens des questions qu'ils ne se posent pas naturellement, et en les amenant à se positionner par rapport aux résultats des sondages. Bien souvent, les questions sont pointues et la plupart des gens ne connaissent pas le sujet. A l'image des "micro trottoirs", les sondages révèlent donc davantage le point de vue du sondeur que du sondé.

Le fait que les questions soient fermées (c'est-à-dire qu'on vous propose différentes réponses), ou  posées de manière vague  ou qu'au contraire elles orientent les réponses, fait que les sondages permettent de manipuler les réponses à l'envi. Par exemple une fois j'ai répondu à un sondage dans lequel la question essentielle était manifestement: "pensez-vous que la campagne de Nicolas Sarkozy est efficace?". A cela, même moi j'ai dété forcée de répondre oui, puisqu'effectivement cette campagne était d'une redoutable efficacité. Mais, quand à l'ouverture du JT de France 2 on entend Pujadas déclarer "60% des français trouvent que la campagne de Nicolas Sarkozy est efficace", on se sent floué. Pujadas n'apporte aucune autre information, aucune autre analyse quant à ce chiffre. Il est balancé comme cela, et qu'en retient le téléspectateur? Que 60% des français approuvent Sarkozy. Mais quand j'ai répondu au sondage, les questions précédentes portaient sur les techniques de campagne, que l'on devait évaluer. La dernière question était donc celle-là. Posée seule, j'aurai probablement répondu différemment à cette question. Voilà un exemple qui illustre parfaitement la manipulation systématique qui suit la publication des chiffres.

En outre, les sondages portent sur un seul sujet, bien précis. Or, le contexte global influe sur l'opinion publique commesondages sur les choix individuels, dont les questions posées par les sondeurs ne permettent pas de rendre compte. On commente, on interprète ces réponses isolées, qui sont censées incarner cette "opinion publique" si volatile. Autant dire qu'à partir de là, ces interprétations ne sont plus que des projections de l'opinion des sondeurs et de leurs commanditaires.

Après 80 ans de recherches, on ne sait toujours pas comment réagit l'opinion publique (qui accessoirement ne réagit certainement pas de la même manière d'un pays à l'autre), donc comment interpréter des sondages?

Paul Lazarsfeld a travaillé sur l'impact des médias sur la formation de l'opinion publique, et en a conclu que l'influence des médias passe par les "relais d'opinion". Ce sont en fait des citoyens qui sont souvent plus informés que leurs proches, et dont l'opinion personnelle sert en quelque sorte de référence au groupe. On n'est donc pas surpris de savoir que les médias ont surtout pour cible ces "leaders d'opinon", qui sont, logiquement, les plus perméables à l'influence des médias. Ainsi, la chaine est complète, et la pensée unique, via les "leaders d'opinion", redescend jusqu'à l'ensemble de la population.
Lazarsfeld a aussi remarqué que les médias établissent clairement l'ordre du jour (fonction d'agenda setter), c'est-à-dire les sujets dont il faut parler, les sujets "importants". Pujadas nous présente ainsi chaque soir "LES titres de l'actualité", comme s'il s'agissait d'une présentation exhaustive. Et on nous parle aujourd'hui d' "opinion publique internationale"!

D'autres aspects des sondages sont à noter. S'ils sont si nombreux, c'est qu'ils rapportent malgré un coût important. Ils rapportent de la notoriété au média qui l'a commandé et qui publie le sondage. En effet, un média reprenant un sondage mentionne le nom de l'institut mais aussi celui du média qui a diffusé le sondage. Sachant que les Unes commencent souvent avec un sondage, particulièrement en période électorale (et surtout si les chiffres sont un peu exagérés!), c'est effectivement une bonne publicité.

L'incessante diffusion de sondages a en plus tendance à effacer tout débat de fond lors des campagnes électirales. Les points sont comptés au coup par coup, c'est à celui qui aura la "petite phrase" la plus assassine.

Les sondages permettent également de "tester" l'opinion publique. Par exemple on organise une fuite, en laissant une info sortir de l'Elysée (augmentation de Sarko, nouvelle loi fiscale ou loi impopulaire en général, fille de Mitterrand...), ou d'une entreprise (rachat, OPA etc), et puis on regarde comment réagissent les gens, si besoin avec quelques sondages.

Le problème de la fiabilité

L'opinion publique est donc en partie influencée par les sondages, comme en 1995 quand Balladur était donné gagnant ou en 2002 lorsque tout le monde a tenu un peu trop vite pour acquis la présence de Jospin au 2è tour. L'importance et le crédit que leur confèrent les grands médias est presque sans limite. Et même lorsqu'un média émet une vague critique, il s'empresse de publier à nouveau des sondages sans plus d'analyse dès que l'occasion se représente. Leur fiabilité est discutable, c'est d'ailleurs l'avis de 82% des lecteurs de l'internaute.com répondant à un "sondage sur la fiabilité des sondages" (sic.), qui considèrent qu' "on leur fait dire ce qu'on veut" (33%) ou qu'ils ne sont pas fiables mais "montrent quand même des tendaces" (48%). Mais ce n'est qu'un sondage réalisé à partir d'un groupe absolument pas représentatif de l'ensemble de la population. Et quand bien même.

En outre, les sondages se contredisent parfois (souvent) et pourtant sont présentés comme des vérités absolues.  Mais la fiabilité des sondages est mise à mal par différents phénomènes:

iflop- les questions en elles -mêmes, qui peuvent être fermées (c'est-à-dire qu'on doit répondre oui ou non), ou suggérer différents choix.

- le contexte: les questionnaires auxquels répondent les sondés comportent des questions préparées pour différents commanditaires. L'institut de sondages, pour gagner du temps et de l'argent, peut mettre d'abord quelques questions sur les services bancaires, puis sur un dentifrice, puis des questions politiques. 

- peu de gens acceptent de répondre: plus de la moitié des gens refusent de répondre aux sondages, et parmi ceux-là seulement 25% acceptent de répondre aux questions d'ordre politique. Ce chiffre ne fait qu'augmenter depuis des années, montrant la méfiance des gens envers la politique en général et les sodages en particulier. Quoi qu'il en soit, les instituts ne prennent en compte que les opinions exprimées, un peu comme le vote blanc et l'abstention qui ne sont pas comptabilisés pour les scores des élections.

- le mode d'entretien: les sondages par téléphone supposent que les sondés aient un téléphone FIXE et ne soient pas sur liste rouge. Ca élimine donc une grande partie de la population. Les sondages en face à face ne sont pas non plus l'idéal, car les gens ont tendance à modérer leurs opinions politiques face au sondeur. Certes, les chiffres sont ensuite "redressés" au vu de données fiables (résultats d'élections précédentes, données précises sur certains électorats...), mais l'écart entre les chiffres bruts et les  chiffres  publiés est parfois si grand que l'on peut se demander si les données brutes ont toujours un sens, et à quoi il sert d'ainterroger les gens si c'est pour obtenir finalement des chiffres si éloignés.

- le fait que les gens soient amenés à exprimer une opinion sur des sujets dont ils ne connaissent pas les tenants et aboutissants. Comme l'explique un ancien "enquêteur" par téléphone "Le sondé doit avoir un avis. Qu’importe son avis, il faut qu’il en ait un."

Quel sens y a t-il à publier un sondage préélectoral annonçant 49% pour un candidat contre 51% pour un autre, quand on sait qu'à 2 ou 3% près (la marge d'erreur) les sondages ne sont pas fiables, de l'aveu même des sondeurs. Qu'on nous donne des fourchettes, alors. Quand on voyait, juste avant le 1er tour de 2002, que Le Pen était autour de 15% et Jospin autour de 17%, sachant cela, et sachant que le vote FN était toujours sous estimé, il y avait de quoi avoir des craintes. Mais aucun sondage n'a mis Le Pen au deuxième tour. Pas un seul. Le citoyen lambda de gauche se dit en conséquence qu'il doit avoir tort de craindre le pire et vote par conviction alors qu'autrement il aurait voté PS (vote "utile"). Et voilà comment Le Pen est arrivé au deuxième tour.

La sondagite comme moyen de gouvernement

Enfin, il semble que les sondages soient un moyen de gouvernement, si l'on en juge par la compulsivité des dirigeants en ce qui concerne les commandes de sondages. On a même des "baromètres" du CEVIPOF et autres instituts de sondages, mensuels, trimestriels, annuels. Par exemple, TNS Sofres et le Figaro ont leur "baromètre", comme beaucoup de médias.
Les politiquess semblent tellement déconnectés de la réalité du terrain, que les RG ne suffisent plus pour avoir une idée de l'état de l'opinion publique. Les sondages servent donc à prendre la température générale, l'ambiance dans le pays (cf. innombrables sondages sur le "moral des français", souvent payés par les grandes surfaces soit dit en passant).

On a vu qu'ils servent aussi à influencer l'opinion publique, ou à la "tester" via des fuites. Ils peuvent aussi servir à fusiller un adversaire politique. Par exemple, imaginons qu'avant mai 2007 Sarko ait eu envie de descendre Raffarin ou Galouzeau, eh bien il ne lui aurait pas été difficile de demander à son "frère" Arnaud Lagardère de faire commander au Journal du Dimanche (le JDD, propriété de Lagardère, donc) des sondages sur la popularité de ces 1ers ministres ou celle de leurs politiques. Et si d'aventure les résultats n'allaient pas dans le sens voulu, on ne les publie tout simplement pas.

menagereuy4Tout ceci entre dans le cadre de ce que certains, comme Alexandre Dorna, appellent le néo populisme, un populisme fondé sur l'image médiatique. Le néo populisme court circuite le système démocratique habituel, avec ses grands messes comme les élections, les communiqués de presse, le 14 juillet et autres moments républicains, pour communiquer directement avec le peuple via les médias, particulièrement la télévision. C'est Reagan qui a inauguré cette nouvelle politique, avec un coté pile et un coté face, l'un repérsentant la réalité du jeu politique, l'autre représentant ce qui est montré au grand public, le "show" en quelque sorte. Berlusconi incarne parfaitement la figure du leader charismatique omniprésent dans les médias. Margaret Canovan appelle cela du "télé populisme", un appel direct au peuple par canal médiatique.

En fait, le leader se moque de l'opinion du peuple mais il maintient une présence constante dans l'esprit des gens via cette omniprésence médiatique. Les sondages contribuent à renforcer ce lien, en laissant croire aux gens qu'on sollicite leur avis pour mieux gouverner. En fait, c'est plutot l'inverse: on leur montre des sondages pour justifier les politiques menées, y compris les plus anti sociales.

Que penser des multiples sondages quotidiens auxquels nous avons eu droit juste après les élections, destinés à légitimer l'équipe Fillon? Un exemple, au hasard: le sondage Opinion Way - Le JDD publié notamment dans Le Figaro indiquant que "69% des français sont satisfaits de la composition du gouvernement Fillon". Or, le gouvernement venait d'être nommé et la plupart de ses membres étant d'illustres inconnus jusqu'alors pour le grand public, on peut se demander selon quels critères les gens ont pu se prononcer. Ou encore les "sondages " exprimant l'opinion "des français" sur le "dynamisme", la "modernité du style", la "compétence" de Sarko, même pas trois semaines après son élection, repris en coeur dans les médias et les blogs sarkozystes.

Que dire également, alors que les conflits sociaux essaiment, des  multiples sondages relatés dans la quasi totalité des médias, déclarant que "les français" sont contre les grèves, pour les réformes, soutiennent Sarkozy etc.?
LCI, la chaîne des amis de Sarkozy, y va franchement depuis le début du mandat si ce n'est avant. On pouvait y lire ce genre de titres: "Réformes: les français d'accord pour le 'tout, tout de suite' "évidemment assortis de chiffres tels que "2/3 des Français estiment que Sarkozy a raison de vouloir mener toutes les réformes en même temps" ou encore mieux "40% des électeurs de Ségolène Royal jugent que le nouveau président de la République a raison d'entreprendre des réformes rapidement".
Les sondages occasionnent inévitablement des paragraphes surprenants pour celui qui s'intéresse à l'état dans lequel on risque de mettre le pays, comme par exemple, toujours sur LCI : "Si 87% des sondés affirment que le style de Nicolas Sarkozy est "différent" de celui de ses prédécesseurs, ils sont 70% a penser que sa façon d'exercer sa fonction "correspond bien" à leurs attentes. D'après l'enquête, le style du nouveau chef de l'Etat est jugé "dynamique" pour 91% des personnes interrogées, "moderne" (85%) et "décontracté" (75%)". Diantre, quelle chance nous avons d'avoir un président "dynamique" et "décontracté" (voire même "décomplexé"...), mais qu'en est-il sur le fond, au juste? Eh bien les sondages ne nous le diront pas. Ils ne peuvent pas nous le dire, là n'est pas leur but. Le but de ce genre de "sondage" est bel et bien d'anihiler la contestation, qui devient pour ainsi dire illégitime au vu de la masse des "satisfaits" et "très satisfaits". La démocratie est donc plus ou moins cadrée par ces sondages, mettant à l'ordre du jour des éléments sans intérêt, mais qui ont la grande qualité d'éluder les questions de fond.

LCI et Le Figaro se sont même associés, comme de toute évidence, pour commander à Opinion Way une grande étude auprès de huit cent et quelque sondés (par internet) pour savoir comment ils percevaient les mouvements sociaux de novembre. On a demandé pêle mêle à des gens pris au hasard s'ils trouvaient légitimes ou non les revendications des cheminots ou des étudiants, malgré le fait que ces gens ne comprenent aux enjeux que ce qui est dit dans les médias commerciaux et dominants.

Evidemment, cela engendre de nouveaux articles et de nouveaux titres aussi percutants et sans appel que "Pour 71% des français, le gouvernement ne doit pas céder" sur LCI. On apprend aussi que "68% des français sont contre les revendications des syndicats", comme par hasard. Ce sondage a été repris dans divers médias, y compris Le Nouvel Obs, très friand de sondages en tous genres. Le Figaro enchaîne en titrant "Les grévistes face à l'opinion", rien que ça! L'opinion étant ici représentée par moins de 900 personnes, il est tout de même bon de le rappeler. Les journaux ont effectivement fait leurs choux gras de ce sondage, et ont à chaque fois cité LCI et Le Figaro, qui y ont gagné en prestige.

Quand on sait à qui appartiennent LCI et le Figaro, c'est-à-dire à Lagardère et à Dassault principalement, des proches de Sarko, on remet en perspective cette floraison de sondages confortant toujours la pensée unique. Et même, quel est l'intéret de publier si souvent de pâles reflets de cette opinion publique, pourtant insaisissable? Quel intéret de résumer "l'opinion publique" à quelques phrases hors contexte assénant des chiffres toujours plus importants? Et encore, que quoi parle t-on? De l'avis de gens qui n'en ont pas forcément et doivent en improviser un sur le champ, quand on leur pose les questions? De l'avis de gens qui ne sont pas au courant des sujets sur lesquels on leur demande de s'exprimer?

Quelle valeur peuvent avoir ces "informations" qui n'en sont pas, mises à la Une dès qu'elles renforcent le ligne éditoriale ou le candidat soutenu par tel ou tel média? A part renforcer la propagande et la pensée unique, je ne vois pas.


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