Cela fait un an qu’on attend le procès de Jean Michel Baroche, en Algérie. Ce français qui se vante de connaitre moult personnalités, dont l’ex premier ministre Edith Cresson, ou encore Fidel Castro, est tombé pour prostitution de mineures. Son procès a démarré jeudi 18 avril, et c’est comme s’il s’agissait surtout de ne pas aller au fond de l’affaire…
Baroche a commencé son business en Tunisie, où il était proche du clan Trabelsi la femme du dictateur Ben Ali. Lors de la révolution en 2011, Baroche est allé développer ses affaires en Algérie, où le climat semblait soudain plus propice. Il avait déjà créé une agence de mannequins en Tunisie, Glamour Arabian Talent, et une autre en Algérie, appelée « Algerian développement Agency » (détenue à 51% par le chauffeur de Baroche), qui servaient à attirer des adolescentes à qui Baroche promettait une carrière en France. Il recevait les candidates, quasiment toutes mineures, dans sa villa sur les hauteurs d’Annaba, une ville côtière de 700 000 habitants, dotée d'un aéroport international et très prisée des touristes.
Les victimes étaient droguées, puis violées par des personnalités lors des partouzes organisées par Baroche, le tout étant filmé. Parfois, ça se passait dans des hôtels luxueux du coin. Les vidéos étaient ensuite transmises à une société de production de films pornographiques en France. Dont on n’a aucune nouvelle, et qui n’a pas été inquiétée.
Huit personnes, dont Baroche, ont comparu.
Evidemment, il se dit innocent, bien qu’une douzaine de victimes aient été recensées. Seules six se sont présentées au tribunal. Quatre autres inculpés, dont un ancien vice-président de l'Assemblée populaire communale (mairie), Saadni Abdenacer, sont emprisonnés depuis un an. Les trois derniers comparaissent libres. Parmi les accusés figurent quatre gynécologues, qui pratiquaient des avortements sur les jeunes filles.
Après deux jours d’audience, vendredi soir le réquisitoire était des plus légers : le procureur n’a demandé que 10 ans de prison contre Baroche (la peine minimale pour ces faits), ainsi que contre son chauffeur Reda Briki, et l’ex haut responsable municipal. Pour la chargée de com’ de la mairie d’Annaba, qui a vécu chez Baroche sans jamais rien dénoncer, on n’a demandé que 5 ans de prison.
On peut se poser des questions sur la manière dont s’est déroulée l’audience, ultra sécurisée : les journalistes ont été sortis de la salle jeudi, et vendredi un huis clos a été demandé dès que Baroche a commencé à s’exprimer. Alors qu’on avait promis de laisser travailler les journalistes.
Baroche nie, et il déclare même (il a 65 ans) que la première plaignante (âgée de 20 ans) a voulu se venger car il allait « la quitter ». Il dit aussi qu’il ignorait que la pornographie avec des mineures était interdite. Le journal El Watan explique « Un jour, selon son témoignage, Baroche lui a "proposé de passer la nuit chez lui car elle était fatiguée". A son réveil, elle s'est découverte nue à côté du Français endormi avec du sang dans le lit. Elle a affirmé avoir été droguée ».
D’après d’autres victimes, Baroche demandait seulement en guise de CV si les adolescentes étaient vierges. Apparemment, c’était tout ce qui comptait pour lui.
Baroche a pu s’installer tranquillement en Algérie car il s’est converti à l’Islam (il s’appelle désormais Abderrhaim) et s’est marié avec une algérienne d’une vingtaine d’années.
D’après certaines sources proches de l’enquête, Baroche avait des « rapports très étroits avec des personnalités algériennes très influentes », ce qui l’aurait aidé à s’installer en Algérie sans difficulté.
Le journal L’Expansion ajoute « Jean-Michel Baroche serait un ami de l'épouse d'un ex-responsable, très influent de l'époque dans l'Etat algérien. Ils auraient fait connaissance en France, par le biais de sa soeur, Stéphane Baroche, magistrate de son état. Dans ce sens on apprend que cette dernière est attendue pour assister au procès de son frère avec un avocat désigné par l'Etat français et une armada de journalistes internationaux ».
Baroche avait mis en quartier sécurisé, et avait reçu plusieurs menaces de mort. Il a aussi bénéficié de « huit visites consulaires », par l’ambassade de France. On notera qu’une jeune française emprisonnée à tort en Turquie pour avoir participé à une manifestation n’a été gratifiée que d’une seule visite consulaire.
Ses ordinateurs n’ont pu être analysés qu’après avoir cracké des codes de sécurité ultra élaborés.
Au début de l’année, Baroche avait sollicité l’aide de François Hollande pour le sortir d’affaire, mais ledit courrier ne serait jamais sorti de la prison et aurait été intercepté par les services pénitentiaires.
On a appris également que durant l’instruction, Baroche cherchait à faire chanter des personnalités, ou du moins à leur soutirer des informations via ses « mannequins ».
Des ONG avaient demandé que Baroche soit jugé en France, ce qui a été refusé également.
D’après certains, une trentaine de personnes étaient impliquées dans ce réseau, dont l’imam qui a marié Baroche et qui ne comparaissait pas au tribunal.
Mise à jour du 15/01/2017:
Baroche a été condamné en octobre 2016 à 6 ans de prison ferme et 26 millions de dinars d'amende par le tribunal d'Annaba, lors du second procès concernant l'affaire. Il avait pris 7 ans fermes en 2013 mais le parquet avait fait appel. Baroche était poursuivi pour une liste de crimes et délits: viol, détournement de mineurs, incitation à la débauche, réalisation de production pornographique, détention et consommation de drogue, corruption, mise de la drogue à la disposition des mineurs et infraction au change pour une somme de 92.000 €.
"Son associé, Réda Briki, qui détient 51% de la société-écran, a écopé de 5 ans de prison ferme et d’une amende de 20 millions de dinars. Quant au vice-président de l’Assemblée populaire communale (APC) d’Annaba, Saadni Abdennacer, impliqué dans cette affaire, il a été condamné à 3 ans de prison ferme et une amende de 10 millions de dinars, alors que l’employée de la wilaya, Fadela Amrane, absente au procès, a, elle, été condamnée à 5 ans de prison ferme par contumace. Les deux médecins accusés d’avoir pratiqué des avortements ont, quant à eux, été acquittés faute de preuves", nous apprend un média local.
On a donc un jugement en mi teinte, mais la peine reste assez importante contre Baroche, qui n'en menait pas large au tribunal. Il devrait cependant sortir bientot de prison car il a déjà fait plus de 4 ans de prison dans l'attente du procès. "Les chefs d’accusation retenus contre les prévenus sont : constitution d’un réseau international de prostitution, détournement de mineures et incitation à la débauche, production et diffusion de films X sur Internet, consommation de drogues et de psychotropes, trafic de devises, faux et usage de faux."
Quant au mode opératoire, il a été confirmé lors du procès: "Sous couvert de cette agence et avec la complicité de ses acolytes, Baroche recrutait des jeunes filles, de préférence mineures, pour soi-disant se constituer une équipe de mannequins. Ces dernières, attirées par le gain et par le fait qu'elles pourraient faire carrière dans ce métier à l'étranger, s'étaient complètement investies dans cette entreprise. Mais les choses ont évolué autrement. Profitant de leur crédulité juvénile, Baroche les droguait pour les passer au lit en prenant des photos et en filmant des scènes pornographiques. Ces films sont ensuite revendus au prix fort sans que ces jeunes filles ne se doutent de rien, puisqu'elles étaient sous l'emprise de drogues et d'alcools lorsqu'elles subissaient ces viols maquillés en séquences où les partenaires sont présentés comme consentants. Ensuite, avec le concours de gynécologues, on procédait à la réparation des hymens pour que les jeunes victimes «recouvrent» leur virginité perdue".
Ajout de décembre 2017:
En octobre 2016, le procès en appel de cette histoire de "réseau international" a eu lieu, toujours à Annaba. Baroche, 71 ans, a été condamné à 6 ans de prison ferme assortis d'une amende de 26 millions de dinars (près de 900.000€ il me semble) contre 200.000 dinars en première instance [1]. Les chefs d'accusation sont variés: constitution d'un réseau international de prostitution, détournement de mineures et incitation à la débauche, production et diffusion de films X sur Internet, consommation de drogues et de psychotropes, trafic de devises, faux et usage de faux.
Selon un média local, "Son associé [et chauffeur] , Réda Briki, qui détient 51% de la société-écran, a écopé de 5 ans de prison ferme et d'une amende de 20 millions de dinars. Quant au vice-président de l'Assemblée populaire communale (APC) d'Annaba, Saadni Abdennacer, impliqué dans cette affaire, il a été condamné à 3 ans de prison ferme et une amende de 10 millions de dinars, alors que l'employée de la wilaya, Fadela Amrane, absente au procès, a, elle, été condamnée à 5 ans de prison ferme par contumace. Les deux médecins accusés d'avoir pratiqué des avortements ont, quant à eux, été acquittés faute de preuves".
D'après le compte rendu de l'audience, les preuves avancées contre Baroche, l'impliquant directement dans ce réseau de prostitution de mineures, étaient "irréfutables". La peine ne serait donc pas si lourde, finalement.
A l'époque, Baroche avait fait 4 ans et demi, il lui restait 18 mois à faire, si bien qu'il ne devrait pas tarder à sortir.
"L'affaire remonte au 23 avril 2012 lorsqu'une plainte avait été déposée par une mineure qui avait tout déballé, accusant Jean-Michel Baroche d'être derrière un réseau de prostitution et qu'elle avait été trompée car elle croyait qu'elle avait été retenue lors des castings pour être formée comme mannequin. L'enquête menée par les services de la police judiciaire avait donné lieu à l'interpellation d'une cinquantaine de personnes, dont 32 avaient été présentées au magistrat instructeur. Baroche, en tant que patron de cette société, cinq médecins, dont deux gynécologues, un imam, le propriétaire d'une villa, un patron d'hôtel sur la côte, un chauffeur, une ex-fonctionnaire de la wilaya, un gardien et des mineures impliquées dans ce scandale devaient ainsi répondre de leurs actes devant la justice. Dix mandats de dépôt avaient alors été ordonnés par le magistrat instructeur près le tribunal d'Annaba", précise encore l'article.
Contre une promesse de rétribution, il recrutait des jeunes filles, si possible mineures, à qui il faisait miroiter un job de mannequin. Au lieu de cela, il les droguait, et leur faisait faire des films pornos qu'il vendait à leur insu. "Ensuite, avec le concours de gynécologues, on procédait à la réparation des hymens pour que les jeunes victimes «recouvrent» leur virginité perdue", et parfois on pratiquait aussi des avortements, signe que les viols n'étaient pas protégés.
[1] Des avocats expliquent ce redressement des amendes par une prise en compte par le tribunal, cette fois, de l'infraction au change commise par les prévenus, qui avaient souvent recours au marché parallèle des devises, à l'occasion de leurs funestes activités.