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1 septembre 2009

Quand les barbouzes se prennent pour les RG

Il y a un sujet qu’il faut aborder, même si c’est en plusieurs volets : cette vague de ce qu’on appelle l’intelligence économique, et ses corollaires à différents niveaux tels que le recrutement de flics et autres anciens des services secrets pour des actes d’espionnage divers et variés. On revient en ce moment sur l’affaire EDF/Greenpeace, qui avait démarré il y a déjà quelques années, quand une officine payée par EDF avait été surprise à espionner le directeur de campagne de Greenpeace. EDF nie, mais le cas n’est pas isolé.

 

Où il est question d’espionner Greenpeace

 

Après quelques mois de tergiversations, le groupe EDF vient d’être mis en examen en tant que personne morale frap13mai_webpour complicité et recel d’intrusion frauduleuse dans un système informatique. En gros, EDF a payé Kargus Consultants, une officine chargée d’assurer l’ « appui opérationnel à la veille stratégique sur les modes d’action des organisations écologistes» pour EDF, qui a elle-même payé un informaticien pour s’introduire dans l’ordinateur de Yannick Jadot, ex directeur de campagne de Greenpeace qui a aujourd’hui rejoint Europe Ecologie. Ca aurait commencé dès 2004 selon certains,

 

Depuis le printemps, quand l’affaire est sortie au grand jour, quatre personnes ont été mises en examen par le tribunal de Nanterre: deux officiers à la retraite chargés de la sécurité d’EDF (qui auraient mandaté Kargus) et deux agents de Kargus, dont Alain Quiros, l’informaticien spécialisé dans le piratage informatique.

Plus récemment, il serait même question de surveillance rapprochée de membres de Greenpeace et même d’infiltration, en France, en Belgique, au Royaume Uni ou en Espagne.

 

Patrick Lorho, le patron de Kargus, est un ancien agent de la DGSE de 44 ans et fait partie des mis en examens. Il a déclaré en avril qu’il « assume complètement la mise sous surveillance de l’ordinateur du responsable de Greenpeace Yannick Jadot, mais je n’assumerai pas le reste et j’aimerais bien que EDF, qui a commandité l’opération, prenne aussi ses responsabilités ».

Evidemment, EDF nie avoir ordonné un tel suivi, dit n’avoir été au courant de rien et conteste le bien-fondé de sa mise en examen. Mais il semble qu’Edf ait déjà été mis en cause dans une affaire d’écoute téléphonique du porte-parole de Sortir du Nucléaire par l’officine d’intelligence économique Securewyse. Sortir du Nucléaire précise à ce sujet que « depuis 2003, une "source" interne à EDF a fait parvenir au Réseau "Sortir du nucléaire" plusieurs documents sensibles, dont un qui concerne l'inadaptation des centrales EDF au risque sismique, et un qui n'est autre que le fameux document Confidentiel défense qui reconnaît la vulnérabilité du réacteur EPR en cas de crash d'avion de ligne».

 

jpg_Taser_71314Où Taser se prend pour les RG

 

On se souvient également de la fois où c’est la société Taser France qui a été mise en cause pour avoir espionné Olivier Besancenot (après l’avoir poursuivi pour diffamation, d’ailleurs), celui-ci ayant eu l’outrecuidance de critiquer l’arme, dite « non létale ». Sept personnes ont été mises en examen, dont deux policiers et un douanier, pour «violation du secret professionnel», «détournement de finalités de données», «divulgation intentionnelle de données confidentielles» et «accès frauduleux à un système de traitement automatisé de données ». Enfin, mis en examen pour « complicité par instruction », nous avons Antoine Di Zazzo, le patron de Taser, deux membres de l’ « agence de détectives » Dusaussy et un ancien flic.

Décidément, on retrouve souvent dans ces affaires d’espionnage d’ONG le trio infernal : groupe quelconque – sécurité du groupe avec d’anciens flics – officine avec anciens flics.

 

Où Nestlé s’intéresse à Attac

 

Cette fois, l’affaire se passe en Suisse et ça a fini en non lieu pour cause de prescription, du moins au pénal, après un procès assez étrange où maintes preuves ont pourtant été fournies par Nestlé soi-même, et une investigation faite à décharge pour Sécuritas et Nestlé. Le groupe Nestlé a donc mandaté Sécuritas, grosse compagnie de sécurité, pour espionner Attac et en particulier des membres qui écrivaient à ce moment-là un livre sur Nestlé, justement. En outre, il semble qu’il y ait eu une certaine coopération entre Sécuritas et la police locale du canton de Vaud où l’affaire se passe, et même la police fédérale de Berne.

 

Encore une fois on retrouve des anciens flics, dont un ancien officier, le chef de la sécurité de Nestlé John Hedley, un ancien du MI6 britannique engagé en 2002, ou encore un ancien cadre de la police fribourgeoise, qui a été pour  Sécuritas « responsable pour Securitas SA à Lausanne du Centre opérationnel investigation service dont les points forts étaient l'observation, la filature, l'enquête et la surveillance » et donc de la personne qui s’est infiltrée chez Attac auprès des rédacteurs du bouquin.

 

Quelque temps plus tard, Sécuritas était à nouveau mis en cause, cette fois pour avoir espionné LausAnimaliste, une association de libération des animaux et ce peut-être dès octobre 2004.

Puis, c’est le Groupe Anti Répression qui dit a été infiltré par une cadre de Sécuritas.

 

Où on nous refait le coup des faux plombiers

 

L’affaire Rhôdia, qui est sortie en 1999, est assez révélatrice de l’atmosphère qui règne autour de ces officines. 05Deux boites d’intelligence économique, Egideria et Astarte, avaient été payées pour espionner deux actionnaires mécontents : le banquier Edouard Stern, décédé plus tard en tenue de latex et le financier Hugues De Lasteyrie, lui aussi décédé mais d’un infarctus foudroyant semble-t-il. Ils disaient que lors de la fusion qui a crée Rhôdia, Aventis avait dissimulé son passif.

Enfin bref, les rapports sur les deux actionnaires ont été remis notamment à un des administrateurs de Rhôdia à l’époque, un certain Thierry Breton, qui nie tout.

 

En Belgique, on parlait en 2007 de l’Eletragate, pour une autre affaire de barbouzerie moderne : le groupe Suez et cinq français ont été inculpés pour « piratage informatique" et "tentative d’interception de communications privées". En 2004, on découvre que le système informatique d’Elecrtabel (l’équivalent belge d’EDF) a été piraté. L’enquête avait montré qu’une nuit de février 2004, un ancien de la DGSE qui avait créé sa boîte de sécurité, Richard Guillet, était entré chez Electrabel déguisé en plombier avec deux collègues, et avait installé des micros espions dans les ordinateurs.

Le trio aurait ensuite déclaré aux enquêteurs qu’ils étaient mandatés par O’Foll Consultants, une officine dirigée par un ancien directeur de la police judiciaire, Olivier Foll, elle-même mandatée par le secrétaire général de Suez, Patrick Ouart (devenu conseiller de Sarko) et Jean Pierre Hansen qui représentait Suez au conseil d’administration d’Electrabel. Ce dernier aurait même carrément prêté sa carte d’accès au siège d’Electrabel aux trois plombiers.

 

Quand des officines de renseignement ont plus de pouvoir que la police

 

Une des grandes questions que tout cela pose est celle du pouvoir de ces officines : Sécuritas, Kargus, Securewyse… toutes ont finalement pris des libertés que la police elle-même ne peut prendre : c’est bien le juge d’instruction qui permet ou non aux flics de lancer des écoutes, des perquisitions, des infiltrations etc.

Le fait que la prescription pour ces histoires soit de 3 ans en Suisse n’empêche pas que même le juge qui a posé le non-lieu reconnaisse que les choses étaient allées trop loin.

 

sarkozykarcherclearstreai2Lesdites officines, ces dernières années, se sont multipliées : par six en cinq ans. Forcément, on trouve de tout depuis la boite de consultants ultra standing jusqu’à la boite de privé miteux. Mais, toutes ont des clients qui peuvent être des grosses boîtes ou des petites aussi, et qui demandent d’espionner tel ou tel concurrent /politique /opposant /employé ou autre. Avec des méthodes qui peuvent être très variables, dans toute la palette de l’illégalité et / ou de la légalité.

 

On parle d’intelligence économique, mais ce terme recouvre des réalités bien différentes. Ca a toujours existé, si on veut, mais aujourd’hui le phénomène prend de l’ampleur, et les méthodes se développent elles aussi. Or, l’éthique n’est certes pas ce qui va étouffer les personnels de la plupart de ces boîtes où pullulent les anciens flics et autres RG, qui bien sûr ont gardé de fructueux contacts parmi leurs anciens collègues.

Les cas de flics pris en train de refiler, contre rétribution ou non, des informations confidentielles tirées des innombrables fichiers de police à des officines privées de renseignement ne manquent hélas pas ces derniers temps. Rien que de très banal, finalement. Patrick Moigne, un commissaire de la Brigade des fraudes aux moyens de paiement de Paris touchait ainsi 50 euros à chaque consultation du fichier stic sur les infractions constatées, pour recevoir au final plus de 20.000 euros sur son compte entre janvier 2006 et juillet 2007. Il aurait entre autres rendu quelques services au patron d’une boîte d’intelligence économique, JLR Conseil (il aurait refilé les infos à un dénommé Leroy, ancien flic de la brigade financière et cadre de JLR), comme la fourniture d’infos sur le groupe Total.

 

Dans l’affaire des frégates de Taïwan aussi, la Direction des Constructions Navales (DCN) qui a construit les fégates a été soupçonnée par le parquet de Paris d’avoir obtenu des informations sur l’enquête des frégates, ainsi que sur celle au sujet de Clearstream. Et ce, via la boîte d’intelligence économique Eurolux Gestion, basée au Luxembourg, qui aurait à son tour recruté un sous-traitant, MJM Partners consultants, dirigée par des anciens de la DGSE et de la DST. L’enquête, appelée « mission Bonaparte », aurait même été étendue à des magistrats comme Renaud Van Ruymbeke.
Les mêmes officines se seraient également vu confier une « mission Lustucru » visant à obtenir des informations sur le groupe Thalès qui cherchait à entrer au capital de la DCN. Eurolux aurait ainsi pu entrer en possession via des milieux judiciaires, pour la modique somme de 18.550 euros, de différentes pièces de la procédure, dont la copie de l’original des listings à l’origine de l’affaire Clearstream.

 

Des cursus universitaires et de nombreuses formations à l’intelligence économique ont été créées ces derniers temps, institutionnalisant certaines pratiques, d’autres pas.

 

On arrive parfois à des pratiques illégales, et les barbouzes reconvertis en pros du renseignement privé peuvent jpg_freg1_0494bse retrouver pris la main dans le sac (ou pas). Patrick Baptendier, un ancien gendarme qui a crée sa boîte de renseignement, a collaboré avec la DST durant ses différentes missions pour deux grosses boîtes d’intelligence économique notamment : Kroll et la française Géos, en informant la DST de ce qu’il apprenait des personnes suivies, telles qu’un patron de presse, un responsable syndical ou le patron de Vivendi. DST qui, échange de bons procédés oblige, refilait à Baptendier les renseignements qu’il demandait.

Autant de missions accomplies pour différents grands groupes comme Bolloré ou les Mutuelles du Mans, ou encore Optimum, la boîte de l’actuelle patronne du medef, la mère Parisot.

Comme le souligne Le Point, aucun membre de la DST n’a été sanctionné ou mis en examen à la suite de cette affaire.

 

De fait, tout le monde semble collaborer, sur le dos des cibles et à la demande de grands groupes. Les renseignements et les officines, de fait, font le même métier, les seconds ayant davantage de marge de manœuvre que les premiers du fait de l’absence de cadre réglementaire.

 

Le paysage français de ce secteur est d’abord constitué de petites structures, autonomes. Et c’est un métier de réseau, où tout le monde ou presque se connaît, ce qui facilite les accointances de tous côtés. Une étude intéressante de Christophe Jorge montre comment fonctionnent ces réseaux de personnes et d’officines en France, du moins une partie.

La technique du tourniquet, comme pour les cabinets de lobbying, tourne ici aussi à plein : on passe de la police à une officine, et pourquoi pas faire les deux en même temps ?  Un exemple révélateur est celui d’Alain Juillet, ex n°2 de la DGSE où il était chargé d’aider les entreprises françaises à conquérir de nouveaux marchés, passé au cabinet d’avocat d’affaires US Orrick. Il y a rejoint notamment Pascal Clément, ancien ministre de la Justice.

 

Tout ce petit monde travaille la main dans la main, et certains sont évidemment plus borderline que d’autres. Quand on regarde la clémence de la justice envers lesdites officines, on peut craindre pour la préservation des libertés, le droit à la vie privée et le droit de se réunir pour discuter de choses alternatives, par exemple.

 

Que ce soit au niveau national ou bien au niveau international, le jeu est le même avec des enjeux proportionnels. A l’international, les méthodes ne sont pas toujours très orthodoxes non plus, et on parle de renversements de gouvernements et de soutien à des groupes insurrectionnels. L’assassinat est également envisageable, ainsi que le chantage. Et au niveau national, pareil : il y a toute une palette de méthodes pour faire peur à un concurrent ou un opposant, ou pour s’assurer un marché.

 

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Commentaires
M
depuis 10 ans il y a des ripoux cher securitas..de l'harcellement au insultes de la sécurité mobile sur les agent sécuritas statiques des années 2000...a 2007 et a nos jours.. ..a se jour les pauvres ratés ont regler leur dette , ils ont etait limoger ou retrograder, en attendant ils ont salis des personnes le mal est iréparable...des agents et d'ancien agents auront se mal a vie.<br /> souvent dans un grand silence des ripoux salice des personnes de qualité qui finiront leur metier plus tot a cause de pouriture de la mobile..surtout dans le centre.
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