L'assassin de Bob Kennedy était sous contrôle mental, selon ses avocats
C’est un document qui interpelle. Public Intelligence a publié récemment un document dans lequel l’avocat de Sihran Sihran, jugé coupable de l’assassinat de Robert Kennedy, explique que son client était sous contrôle mental au moment des faits. Il dit aussi que les balles qui ont tué Kennedy provenaient d’une autre arme que celle de Sirhan Sirhan, un réfugié palestinien de 25 ans, sorti de nulle part.
Lors du procès qui a mené à la condamnation de Sirhan Sihran[1] en 1969, ses avocats avaient déjà souligné l’ « évidence » de son innocence et les nombreuses violations de ses droits. Aujourd’hui, ils veulent le faire sortir de prison et avancent de nouveaux arguments.
Les avocats actuels de Sirhan, qui espèrent faire libérer leur client, expliquent par exemple que le parquet a refusé de transmettre l’autopsie à la défense jusqu’à la veille du procès alors qu’ils l’ont eue des mois auparavant.
L’autopsie montrait quelques incohérences dans la théorie de l’accusation, mais Cooper, l’avocat de Sirhan en 69, s’est bien gardé de les souligner. Il n’a pas non plus relevé les problèmes au niveau de l’analyse balistique, dont on va reparler brièvement, et n’a pas jugé utile de faire des recherches quant au nombre de tireurs et de coups de feu. Sirhan n’a jamais pu avoir connaissance des analyses de sang et d’urine réalisées juste après son arrestation, et elles ont été détruites très rapidement.
Les avocats de Sirhan ajoutent que lors du procès, on a remplacé la balle qui était dans le crâne de Kennedy par une autre afin de faire accuser leur client.
En outre, un document audio récemment mis au jour[2] fait apparaître que pas moins de 13 coups de feu ont été tirés en l’espace de 5 secondes, alors que l’arme de Sirhan Sirhan ne pouvait contenir que huit balles[3]. Du coup, les avocats affirment qu’il y a forcément eu deux tueurs. L’enregistrement en question aurait été pris à environ 12 mètres du lieu de l’assassinat (40 pieds) par un journaliste dénommé Pruszynski, qui était derrière Kennedy[4]. L’analyse des sons effectuée par Philip Van Praag, un spécialiste du son (p.100 et suivantes), a aussi permis de conclure qu’on entend deux armes différentes : un Iver Johnson Cadet 55SA (celui qui était vraisemblablement dans les mains de Sirhan) et un Harrington & Richardson 922.
Dans le même genre de contradictions, il s’avèrerait que les quatre balles qui ont touché Kennedy provenaient de très près derrière lui, alors que Sirhan se trouvait face à lui, selon les témoignages d’une douzaine de personnes présentes sur place (cf. p.67 et suivantes). Ou, des témoins présents lors des faits affirment que des gens ont bloqué Sirhan juste après qu’il ait tiré son deuxième coup de feu, et qu’ils ont pris son arme, si bien que les derniers coups de feu ont été tirés ailleurs que vers Kennedy.
Depuis 1968, l’assassin officiel dit qu’il ne se rappelle pas du moment où il a tiré. Et ses avocats disent que c’est parce qu’il était à ce moment sous l’emprise d’un contrôle mental, d’une « hypno programmation », dit autrement.
Un expert, prof associé en psychologie à Harvard et spécialisé dans l’hypnose, le confirme après avoir interviewé Sirhan durant 60 heures en l’espace de trois ans. Daniel Brown, c’est son nom, affirme en effet que l’assassin aurait été manipulé au moment des faits, et même qu’il était accompagné par un moustachu à l’accent étranger, qui a refusé de s’identifier et de signer le registre. Le moustachu aurait dit à Sirhan que les officiels du gouvernement doivent être tués.
Il explique que l’une des grandes « preuves » à charge était qu’on a trouvé l’inscription « RFK must die » dans le calepin de Sirhan, probablement écrite de sa main. Mais, il aurait écrit cela de manière automatique.
Brown pense même qu’il a fait une fausse confession en avouant pendant son procès avoir tué Kennedy, et que cette confession lui a été induite avant les faits. Pour cela, précise Brown, il faut un sujet très réceptif à l’hypnose, un fort conformisme social, et une forte capacité de dissociation. Il ajoute qu’il est très rare que quelqu’un revienne sur de fausses confessions.
Mais, un autre expert, Herbert Spiegel spécialiste de l’hypnose à l’université de Columbia, estimait dans les années 90 qu’il y a de très fortes probabilités pour que Sirhan ait été sous contrôle mentale. Toutefois, le tribunal a refusé qu’il rencontre Sirhan en prison. Mais, Spiegel est parvenu à imprimer des informations dans l’esprit de personnes sous hypnose lors de diverses expériences. On peut même induire des émotions, une amnésie, une envie de meurtre ou de suicide[5].
D’après ce qu’explique Brown dans une lettre d’argumentation au tribunal (p.220 du document), un certain nombre de scientifiques auraient ainsi démontré que sous hypnose, on pouvait faire faire n’importe quoi à quelqu’un, y compris des actes antisociaux. Des recherches ont ainsi permis de comprendre que les gens qui ont agi sous hypnose sont plus passifs et ne se montrent pas particulièrement préoccupés par les conséquences de leurs actes. Ils sont aussi moins perturbés par leurs actes que s’ils avaient agi dans un état de conscience. Et cela, surtout si on utilise des drogues telles que le LSD en même temps, ainsi que des études menées dans les années 60 par John Lennox de l’université de Californie (UCLA) et par la CIA le montrent.
Le très sérieux Journal of Amercican Medical Association a d’ailleurs publié plusieurs études de ce type dans les années 50 et 60. La CIA a beaucoup travaillé sur ce sujet, puis a répandu dans l’opinion publique l’idée que ces recherches s’étaient avérées infructueuses, mais d’après Brown des rapports non officiels disent le contraire[6]. Brown évoque aussi les recherches d’Ewen Cameron ou les programmes MK Ultra ou ARTICHOKE, autant de fait aujourd’hui bien renseignés par de nombreuses archives.
Dans le cas de Sirhan, ses proches affirment qu’il a disparu pendant deux semaines après une chute de cheval, et qu’il est revenu différent. D’après Brown, Sirhan se rappelle alors une unité dans un hôpital qui ressemble à une prison, où il oscillait entre conscience et inconscience comme s’il avait été sous l’influence d’hallucinogènes, de médicaments ou bien qu’il était sous hypnose.
[1] Né en Cisjordanie en 1944 dans une famille maronite, ses parents ont émigré quand il avait 12 ans et se sont installés en Californie. Son père est ensuite rentré seul au Moyen Orient. Sirhan a changé de religion plusieurs fois, devenant baptiste, puis adventiste du 7e jour, et a probablement versé dans l’occulte.
[2] Des analyses réalisées en 2007 sur un enregistrement jamais étudié ont montré que l’entend treize détonations. En outre, à au moins deux reprises, le temps entre deux coups de feu est insuffisant pour que ce soit la même arme qui ait tiré. Un autre affirme que ce sont au moins quatorze coups de feu qui ont retenti.
[3] Comme par hasard, le tribunal avait décidé à l’époque qu’il n’y avait pas eu plus de huit coups de feu de tirés.
[4] En fait Pruszynski avait perdu l’enregistrement original, mais en 2004 ou 2005 un journaliste de CNN a mis la main sur des archives de l’Etat de Californie qui contenaient une copie partielle de l’enregistrement fait à l’hôtel Ambassadeur dans la nuit du 4 au 5 juin 1968.
[5] Des expériences ont été menées par la CIA à ce sujet dans les années 50, comme le détaille Alan Scheflin (p. 130 et suivantes)
[6] Dès les années 20, un dénommé Georges H. Eastbrooks, de Harvard, a cherché à inculquer des personnalités multiples via l’hypnose, ce qui appelait des « agents doubles » puisque chaque personnalité ignore ce que fait l’autre. Eastbrooks les appelait des « super espions », et pour cause : même eux ignoraient ce qu’ils faisaient. Dans les années 30, la CIA s’est beaucoup intéressée à ses travaux, et le phénomène a été décrit ensuite par les militaires.