Montreuil: mobilisation de soutien aux enfants qui ont dénoncé des abus sexuels à l'école
Je relaie ici un appel à la mobilisation afin d'alerter sur une affaire assez interpellante d'abus sexuels commis par du personnel scolaire dans une école de Montreuil. Cet appel à se rassembler le 29 avril à 14 h devant la mairie de Montreuil représente également un soutien aux victimes, qui jusqu'à présent ne sont pas entendues par les autorités.
C'est l'association Wanted Pedo qui a soulevé le lièvre via les réseaux sociaux. Apprenant que plusieurs cas d'abus sexuels avaient été dénoncés à Montreuil au début de l'été, des membres de WP sont venus distribuer des tracts de prévention sur place, devant l'école Louis Aragon, où des faits se seraient produits.
Dans ce dossier, il y a plusieurs éléments à noter:
> Une première affaire a été mentionnée dans la presse en juillet, mais dans l'école Jules Ferry. L'affaire du petit C..., 3 ans, qui a dit que deus éducateurs l'ont agressé sexuellement, notamment en lui enfonçant un objet dans les fesses. Les parents ont porté plainte: ""Il hurlait aux toilettes", poursuit [sa mère], précisant que Cais a pourtant "une bonne digestion" et n'est "pas constipé". "J'ai compris directement qu'il s'était passé quelque chose", ajoute-t-elle, affirmant avoir retrouvé "des traces blanchâtres sur [les] sous-vêtements" de son fils. Le père, Stéphane, qui a témoigné auprès de Buzzfeed, donne plus de précisions : "Il nous a dit qu’il avait été seul dans une pièce et que trois enfants avaient rentré un jouet dans ses fesses. Il a dit qu’il a eu plusieurs pénétrations en faisant le signe de 4 avec ses doigts et des claques sur les fesses". Stéphane en est convaincu, "des animateurs étaient aussi présents".
> L'enquête concernant C. est classée sans suite et conclut, en gros, que l'agression potentielle a eu lieu entre gamins de 3 ans. L'Unité médico légale de l'hôpital Jean Verdier à Bondy trouve une explication à la fissure anale constatée par d'autres médecins : "Contrairement aux diagnostics établis précédemment, l'unité estime que la fissure anale pourrait avoir été causée par l'introduction d'un jouet ou par une constipation".
> La mairie de Montreuil résume ainsi l'affaire en septembre 2016: "Cette rumeur [les propos de l'enfant, la plainte et la mobilisation] s’est heureusement révélée fausse et l’enquête a été classée sans suite par Mme la Procureure de la République. Mais chacun se souvient que cette rumeur a donné lieu a une vaste manipulation relayée là encore par des réseaux et des médias peu scrupuleux. Cette manipulation jetait l’opprobre sur le corps enseignant, le personnel des temps périscolaires, et notre municipalité, tous accusés, notamment lors de manifestations devant l’école et la mairie, par les membres de l’UDC de couvrir une affaire de pédophilie".
> En juin un autre enfant a signalé des agressions sexuelles commises au centre de loisirs de la ville. Les parents ont porté plainte mais celle-ci a été classée sans suite.
> En août, 3 familles d'élèves de l'école Louis Aragon portent plainte "contre deux animateurs, qu'ils accusent de viols et d'agressions sexuelles", selon LCI. L'un des gamins a expliqué qu'un éducateur avait "sorti son zizi" et commis des agressions sexuelles un peu plus tôt durant l'année scolaire, et qu'un autre éducateur commettait des attouchements. Aujourd'hui, certains [1] parlent de 5 enfants ayant dénoncé ce genre de faits dans l'école, tous âgés de 4 ou 5 ans. L'un de ces enfants a contracté une MST (nesseria gonorrhoeae, décelée par des prélèvements au niveau de l'anus), mais la justice considère apparemment qu'il l'a attrapée sans aucune intervention d'ordre sexuel.
> Les enfants ont été entendus par la brigade des mineurs, vus par un médecin, et les deux éducateurs ont été placés en garde-à-vue puis libérés car ils ont nié les faits et parce que les forces de l'ordre ont considéré qu'il n'y "avait rien pour les mettre en cause" [2]. Les plaintes sont classées sans suite.
> Dans la foulée la mairie ainsi que l'école ont contre attaqué en portant plainte contre les parents pour diffamation et menaces. D'ailleurs, on remarque très vite que, si les familles des enfants se montrent revendicatifs, ce qui peut se comprendre, il en va de même du côté de la mairie, qui semble ne pas laisser une seule place au doute: pour la mairie de Montreuil, il ne s'est jamais rien passé. Cependant, un classement sans suite ne prouve pas qu'il ne s'est rien passé, il dit seulement que, pour la justice dont on connait l'absence de moyens, l'enquête n'a pas permis de récolter assez d'éléments de preuve pour poursuivre.
> Depuis le début de l'été 2016, diverses manifestations ont été organisées par des soutiens des familles, devant les écoles concernées et devant la mairie. Des pétitions et appels à mobilisation sont diffusés et l'affaire est évoquée sur les réseaux sociaux, notamment avec le diese #JusticepourCais ou la page Facebook dédiée. Face à cela, les soutiens des familles sont attaqués par la presse commerciale et la mairie.
> Il se trouve que les enfants ont pourtant parlé, et cela de manière assez claire. Il n'y en a pas qu'un, mais cinq, tous des garçons, tous à peu près du même âge et tous de familles issues de l'immigration. Les enfants ont donné les noms d'autres victimes potentielles.
> Les familles de quatre enfants qui ont parlé d'abus à l'école se sont constituées partie civile en début d'année 2017. Trois des parents ont été convoqués au commissariat début mars, car ils sont accusés de menaces réitérées de violences sur une personne.
> Des prélèvements de cheveux aux fins d'une analyse toxicologique ont été réalisés sur au moins l'un des enfants, au mois d'août. A ce jour la famille n'a toujours pas de nouvelles de ces analyses, qui ont été réalisées en raison de suspicions que cet enfant a été drogué.
Le prochain rassemblement a donc lieu devant la mairie de la ville le 29 avril, à 14h.
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Il est probable qu'on va nous refaire le coup d'Outreau, le coup des "enfants menteurs". pas le choix: ils sont désormais 5 à dénoncer des abus commis dans, mais aussi hors de l'école. La réaction de la justice et des autorités locales n'a rien d'étonnant: c'est la coutume dans ce pays de mettre sous le tapis ces affaires qui dérangent. En l'occurrence, il semble que les familles sont décidées à faire entendre la voix de leurs enfants. Mais, elles se heurteront la "justice" et à la classique absence de preuves matérielles pour incriminer l'un ou l'autre. Encore une fois, cela posera les questions suivantes:
==> Comment prend-on en compte la parole des enfants victimes?
==> Quels examens médicaux et psychologiques sont réalisés, par qui et avec quels moyens?
==> Pourquoi dans ces affaires d'agressions sexuelles sur mineurs la "justice" ne voit-elle encore que par les preuves métrielles, très rares, quitte à classer sans suite 98% des plaintes pour ce type de faits?
[1] Notamment l'association locale anti raciste UDC (unité, dignité, courage), qui suit ces affaires depuis le début.
[2] La mairie de Montreuil explique de son côté que "Il a été précisé que les enquêteurs et la justice avaient décidé de laisser les agents en liberté. Dans ces conditions la ville était tenue par la loi et la présomption d’innocence de ne pas suspendre les agents."