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21 janvier 2010

L'Allemagne lance le flicage des salariés... surtout les grévistes

 

20080725fichierL’imagination des bureaucrates est sans limite, notamment quand il s’agit de fliquer le populo. Dernière trouvaille en date, venue d’Allemagne cette fois-ci : le fichier ELENA (Elektronischer Entgeltnachweis, ou attestation électronique de revenus).

On a eu EDVIGE, glissé en douce cet été après le fichier ARDOISE, mais il s’agissait de fliquer des terroristes potentiels (surtout dans les rangs des gauchistes, cela va de soi). Parce que bon, l’extrême droite n’est pas un problème, de nos jours. Bref, en Allemagne, on a trouvé un autre prétexte, utilisé assez souvent par les gouvernements qui veulent faire de la casse sociale : la « simplification » des procédures administratives.

 

Comme quand sarkoléon nous a « simplifié » le code du Travail, par exemple…

ELENA, à vrai dire, traîne dans les tiroirs depuis quelques années, et Schröder y pensait déjà, pour « simplifier » les démarches administratives. En 2008, ledit fichier avait remporté haut la main le Big Brother Award, qui récompense l’invention la plus liberticide de l’année.


Depuis, le fichier a été remanié et est encore pire. Mais en 2008, déjà, il s’agissait d’un fichier centralisé regroupant les informations sur les rémunérations et les ressources des 40 millions de salariés allemands. Le système est simple : au nom de la « simplification », de la « diminution des coûts »1] et bien sûr de la « lutte contre la fraude », tous les employeurs doivent entrer informatiquement les salaires et autres qu’ils versent à leurs employés, via un « certificat électronique de déclaration ». Comme ça, dès qu’un salarié ou ex-salarié demande à l’Etat une prestation sociale (parce que oui, les vaches à lait, parfois, se retrouvent au chômage), il sera facile de vérifier si la demande est réglementaire ou pas.

C’est sûr : il n’y a plus de paperasse. Avec la « carte ELENA » qu’on lui donnera, le salarié pourra faire des démarches en ligne sans devoir chercher moult justificatifs. Mais, le revers de la médaille n’est pas négligeable. Car on n’enregistre pas que les salaires. Il y a aussi les noms, adresse, date de naissance, le numéro d’identifiant pour la retraite, la durée du contrat de travail, et des données sur l’employeur.

Quelle ne fut pas la surprise des salariés allemands lorsqu’ils constatèrent, en 2009, que des informations sur les grévistes étaient aussi comprises dans le « certificat électronique de déclaration »…

En effet, les grévistes sont mentionnés, ainsi que leur temps de grève et les motifs de la grève, c’est-à-dire sa « légitimité ». Et puis, tant qu’à faire, on mentionne aussi les salariés licenciés, la « raison » du licenciement en question (et on le sait bien, les motifs de licenciement deviennent de plus en plus laxistes), les rappels à l’ordre reçus par les salariés, l’absentéisme2] etc. Au final, le « certificat » de chacun des millions de salariés Allemands fait… 41 pages !


Retour au XIXè siècle

Clairement, on en revient au fameux livret ouvrier du XIXème siècle3], contre lequel se sont battus les travailleurs pendant des dizaines d’années. C’était un carnet, dans lequel les employeurs successifs des salariés écrivaient leurs commentaires sur son comportement et son efficacité. Le pauvre bougre devait traîner son livret durant toute sa vie professionnelle, et une mauvaise appréciation (ou pas de livret) pouvait l’éloigner définitivement du monde du travail.

En principe le fichier ELENA devrait être opérationnel en 2012, mais la collecte des informations auprès des trois millions et quelque d’entreprises allemandes a commencé. Et le plus grand syndicat allemand, ver.di, a menacé de porter plainte devant la Cour européenne des Droits de l’Homme pour, justement, atteinte aux droits de l’homme.

Et, comme pour le fichier EDVIGE passé par décret en plein été, la contestation de la population a un peu freiné les 1982341428ardeurs liberticides du gouvernement. Il serait même question de retirer le fichier, comme sarko et MAM ont retiré EDVIGE, avant de nous la refourguer sous le nom de EDVIRSP (certes, un peu plus dur à retenir, mais avec quasiment le même contenu et aucun contrôle des données possible).

La tendance est là : on veut fliquer le salarié/consommateur/citoyen/militant/gauchiste de manière systématique. Les fichiers légaux prolifèrent, mais les fichiers illégaux aussi. EVIGE, par exemple, a longtemps existé de fait sans être légal.

Et dans certaines entreprises, comme France Telecom, on a pris la direction à remplir des fichiers sur certains salariés, où on mettait des informations sur leur santé et éventuels problèmes personnels (pour virer les suicidaires ?) ainsi que leurs actions syndicales, forcément louches. On a aussi chopé un site d’Alstom dans les Yvelines, jadis, qui avait crée un fichier mentionnant la vie privée, le caractère, la motivation des 548 salariés de la boîte… Mais les exemples sont nombreux4] et tous illégaux, du moins pour l’instant.

 

 

 


 

[1] 85 millions d’euros d’économies espérés, il fallait au moins ça…

 

[2] Apparemment, dans une version antérieure du fichier l’employeur devait même mentionner les causes de chaque absence. Et bien sûr de chaque départ.

 

[3] Inventé, je vous le donne en mille, par Napoléon en 1803 (et renforcé par Napo III), pour limiter la circulation des travailleurs (il fallait demander une autorisation à la commune pour quitter l’endroit, et dire où on allait). La même année, les rassemblements d’ouvriers sont prohibés…

Celui qui n’avait pas son livret était considéré comme un vagabond, et était envoyé en prison ou au bagne. Evidemment, sans livret pas de travail. Il fallait que l’employeur ait inscrit la date de sortie et signé le livret (contresignés par le Maire), sinon le travailleur ne peut pas partir, et sûrement pas trouver un autre emploi. Bizarrement, en 1810, napoléon a interdit le droit de grève… Il a été abrogé en 1890. Ce qui est drôle, c’est que les employeurs ont trouvé, à force, le système trop contraignant : remplir le livret quand on emploie 40 personnes pendant 2 ou 3 jours est une contrainte terrible, et puis il était possible de fliquer les ouvriers autrement.

 

[4] Un centre Leclerc a été condamné à 30.000 euros d’amende (ouh), pour un flicage des horaires de travail et des caméras non déclarées.

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