Des gangs de pédophiles impunis au Royaume-Uni
Le 1er novembre 2003 [1], Charlene Downes, 14 ans, disparaît Blackpool, une ville côtière à 50 km de Manchester, 12e ville la plus pauvre du pays. Depuis quelques mois, l’adolescente avait de mauvaises fréquentations, et elle avait même été virée de son école. On a appris qu’elle faisait partie d’une soixantaine de gamines dont certaines n’avaient que 11 ans, exploitées sexuellement par un réseau qu’il faut bien qualifier de pédophile.
Ce 1er novembre, Charlene dit qu’elle va rejoindre des amis sur le quai de Blackppol puis elle disparaît. La dernière fois qu’on la voit, elle est seule dans le centre-ville, pas loin d’une rue pleine de fast foods.
La police comprend vite que Charlene se trouvait prise dans un réseau de prostitution de mineures. Apparemment, plusieurs dizaines de gamines du coin auraient eu à cette époque l’idée géniale de se prostituer contre hamburgers, des cigarettes et un peu d’affection… C’est du moins la version de la police.
Durant des années, les forces de l’ordre ont enquêté au sujet d’une disparition et non d’un meurtre. Jusqu’à ce que certains éléments au sujet de la disparition ne deviennent publics, ce qui faisait un peu tâche.
Quand on a finalement considéré qu’il s’agissait d’un meurtre[2], plusieurs arrestations ont eu lieu et en 2007, deux types qui tenaient un fast food ont été envoyés en procès. Car, très vite les enquêteurs ont compris que le meurtre était très certainement lié au réseau de prostitution. « Il y a toujours eu des niveaux choquants d’abus sexuels sur les mineurs dans cette ville. Mais avant la disparition de Charlene, on mettait tout ça sous le tapis », avait déclaré un travailleur social de l’époque.
L’un des types, un certain Iyad Albattikh, était Jordanien et a été accusé du meurtre, l’autre, prénommé Mohammed, a été accusé d’avoir fait disparaître le corps en le transformant en kebab. Les deux ont nié avoir jamais connu Charlene Downes.
On notera que cette version est bien pratique, au cas où Charlene Downes a été massacrée d’une manière un peu satanique : pas de corps, pas de preuves. Mais, j’ai sûrement l’esprit mal tourné.
En tout cas, les preuves étaient limites puisque le jury n’est pas parvenu à rendre de verdict lors du premier procès (malgré 49 heures de délibération), et que lors du deuxième procès c’est l’accusation qui a fini par laisser tomber les charges[3].
Comme on est revenu au point de départ, la police a rouvert le dossier et lancé un nouvel appel à témoins en novembre 2013.
Une autre disparition
En même temps, on a repris le dossier de la disparition d’une autre gamine de Blackpool, Paige Chivers. Elle a disparu à 15 ans, après une dispute avec ses parents. Elle aussi venait d’une de ces familles déphasées, avec un père violent.
La police a vite appris que, quatre bans après Charlene Downes, Page Chivers évoluait exactement dans le même réseau juste avant sa disparition. Elle fréquentait en effet le même kebab. Là encore les flics ont considéré qu’il s’agissait juste d’une « personne disparue » pendant plus d’un an. Comme pour Charlene, on n’a jamais retrouvé son corps.
D’après les autorités, une soixantaine de gamines se trouvaient dans l’orbite de ce réseau, apparemment bien installé à Blackpool.
Un suspect a été arrêté en 2009 car, nous a-t-on dit, on pensait qu'il avait assassiné Paige Chivers. Mais, il est probable que cette arrestation n'avait pour seul but que de montrer que la police était toujours en travailler sur ce dossier.
Il faut dire que Blackpool est une charmante bourgade : 800 délinquants sexuels y vivaient à l’époque, c’est plus que partout ailleurs dans le pays. C'est à un tel point qu’on pouvait se demander pourquoi la ville attirait tellement ces pervers.
Bon, officiellement, et d’ailleurs c’est toujours le cas, les organisateurs de ces réseaux de prostitution de mineures sont des étrangers[4]. Alors que les victimes sont presque toutes blanches. Ce qui excite beaucoup l’extrême droite.
Et on évite de se poser trop de questions sur les clients, évidemment. La presse n'en parle pas, et ils ne sont pas présents lors des procès, ne serait-ce qu'en tant que témoins.
Parce que là, c’est tout de suite plus varié, comme l’ont montré certaines affaires récentes. Mais à chaque fois, les clients s’en sont tous tirés bien qu’ils aient payé des mineures pour des « rapports sexuels ». A Blackpool, la prostitution est endémique, et la ville est bien connue pour ça. Y compris, semble-t-il, pour ses gamines qui se vendent contre quelques livres, ou pour des clopes, à l’arrière des fast foods.
Aujourd’hui, la ville est très réputée pour sa culture de la boisson, et les journaux ont souvent parlé de ces jeunes ivres morts chaque week-end dans les rues de la ville.
Depuis que ces affaires ont fait les Unes des journaux, les histoires de pédophile n'ont pas manqué dans le coin. Il y a aquelques mois, la police de Blackpool a dit que plus d'une centaine d'enfants avaient été identifiés comme étant à risque par rapport à la présence de pédophiles.
En février 2013, un pédophile de Blackpool pourtant décédé en 2010, un certain Raymond Hewlett, avait fait parler de lui car il avait donné des tuyaux aux autorités concernant l'affaire Maddie McCann.
Comme de nombreux pédophiles anglais, en réseau ou pas, Hewlette a vécu un certain temps au Portugal, pas très loin de Praia de Luz, où a disparu Maddie en 2007. Avant de mourir, Hewlett aurait dit à son fils qu'il savait qui avait enlevé la gamine. Apparemment, suite à ces révélations, l'enquête a été orientée vers l'Ukraine et la Russie.
En janvier 2013, un dénommé Kenneth Trotter, vieux pédophile sadique, a été extradé d'Australie après avoir été condamné pour pédophilie. Aprèès avoir passé quelques mois à Londres, devinez où Trotter a choisi de s'installer? A Blackpool bien-sûr. Il a été hebergé dans une institution puis a disparu de la circulation. QUand on l'a retrouvé, il a avait rejoint un groupe paroissial et s'occupait des jeunes.
Pourquoi a-t-il choisi Blackpool? "En raison de la forte concentration de jeunes vulnérables", nous dit le Daily Mail.
On a déjà parlé ici de William Goad, le pédophile le plus prolifique d'Angleterre, avec 3.500 victimes qu'il a décomptées lui-même. Goad est mort depuis un moment, mes ses complices courent toujours.
De nombreuses pistes données par ses nombreuses victimes n'ont pas été explorées par les enquêteurs, notamment des lieux à Blackpool où des viols d'enfants avaient eu lieu. Goad a aussi emmené des victimes aux USA, mais il n'était apparemment pas urgent de mener des recherches à ce sujet.
Dans le réseau de Goad, un réseau, donc, largement impuni, les flics ont dit qu'il y avait des types très bien placés. Ce qui explique probablement l'omerta au sujet des connexions de Goad.
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On constate hélas, chez nos voisins anglais, une multiplication de ces "gangs" d'étrangers qui prostituent des gamines. L'affaires Downes remonte à dix ans déjà, et il semble que rien n'a été fait pour endiguer le phénomène, à Blackpool et dans le reste du pays. Quant aux clients, il y a certainement un tas de paumés qui en paient que quelques dollars la passe, mais pas seulement. En tout cas, l'impunité règne même si quelques sous-fifres (tous "étrangers") sont envoyés en prison.
[1] Il s’agit d’une date sataniste, qui correspond au culte païen des morts.
[2] Apparemment, les flics étaient convaincus dès 2005 qu’il s’agissait bien d’un meurtre, puisqu’ils l’ont dit aux parents.
[3] Les deux accusés ont donc été libérés, et ont reçu une compensation financière de l’Etat.
[4] On l’a vu par exemple avec les affaires d’Oxford et de Rochdale.